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Ceux qui décident

Ceux qui decident

Lisen Adåge n’est pas une inconnue en France où plusieurs de ses albums ont été publiés ces dernières années. Auteure illustratrice (née en 1982) et sœur jumelle d’Emma (également auteure illustratrice traduite ici), elle livre aujourd’hui, aux excellentes éditions L’Étagère du bas, un bel album : Ceux qui décident. Une histoire qui prend une cour de récréation pour cadre, illustrée aux pastels secs et à la gouache, très vivante, sur le thème de l’égalité des droits. Par exemple. Ou de la justice. Ou de l’entraide. Ou de l’indifférence. Ou... Différents thèmes apparaissent, avec un leitmotiv : on ne doit pas se laisser faire. Ceux qui décident (ou veulent décider) sont moins nombreux que ceux qui se laissent faire (volontairement ou contraints) – « nous, qui n’avons rien le droit de faire ». Ces derniers ont leur mot à dire : on appelle cela la démocratie. Il n’est pas toujours nécessaire de se battre pour l’obtenir, un peu de jugeote et de solidarité, comme dans ce livre, remplacent parfois les muscles. « Et soudain c’est NOUS qui avons décidé. » Subtil et puissant, cet album.

* Lisen Adbåge, Ceux qui décident (Dom som bestämmer, 2018), trad. Marianne Ségol-Savoy, L’Étagère du bas, 2021

 

Chambre 213

Chambre 213

« ...La colo m’avait paru super cool. Du soleil, des baignades, du canoë, des feux de camp, des boums... pendant une semaine entière ! » Elvira est aussi heureuse que craintive de partir pour la première fois seule, en colonie de vacances. La voilà qui partage sa chambre avec Bea et Meja. La chambre 213, comme la plaque d’immatriculation de l’automobile qu’elle a vue dans une station-service en faisant route avec sa mère pour venir ici. Un nombre porte-malheur ? Et pourquoi des objets leur appartenant disparaissent-ils mystérieusement – une bague, un stylo, un appareil photo ? Quelqu’un leur ferait-il une plaisanterie ? « ...J’avais le sentiment d’être dans un rêve. Ou plutôt dans un cauchemar, où tout paraît à la fois réel et irréel... » Best-seller en Suède, ce roman bien mené de Ingelin Angerborn (née en 1966), Chambre 213, ravira forcément les lecteurs adolescents qui aiment jouer à se faire peur. « Dix ans après sa parution, il est toujours dans le top 5 des livres les plus empruntés en bibliothèque », avertit la notice consacrée à l’autrice en fin de volume.

* Ingelin Angerborn, Chambre 213 (Rum 213, 2011), trad. Johanna Kuningas, Rageot (Enquêtes d’Europe), 2022

Voyage à chat

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Au Nord les étoiles : nom original pour une nouvelle maison d’édition associative, qui entend publier des auteurs scandinaves méconnus ou inconnus ici. Le premier titre est un classique suédois (posthume), Voyage à chat, du peintre et écrivain Ivar Arosenius, (1878-1909) initialement publié en Suède en 1909. Destiné aux tout petits, cet ouvrage joliment illustré par l’auteur met en scène une fillette qui, au cours de sa promenade grimpée sur le dos d’un chat, rencontre divers protagonistes : une vache, un policier, un crocodile ou « un beau cheval qui portait sa tenue de bal » et même un roi. Écrit sous forme de comptine, ce Voyage à chat est surréaliste avant l’heure, non pas tant au niveau des illustrations, classiques et sobres, que du fil de l’histoire, passant d’une idée à une autre en toute liberté, comme au gré de l’imagination de Ivar Arosenius. La maison d’édition Au Nord les étoiles projette de publier prochainement Elsa Beskow (dont, il y a peu encore, on trouvait en France quelques albums) et Hjalmar Bergman (que les éditions de l’Élan ont sorti de l’oubli). « Créée (…) par deux traductrices franco-suédoises, elle est née d’une passion commune pour la traduction et la littérature de jeunesse, et du constat que de nombreux textes scandinaves, notamment classiques, restent encore inédits en français. La priorité sera donc donnée aux œuvres classiques, sans oublier pour autant les textes plus contemporains. Les publications relèveront de genres différents – recueils de textes illustrés (récits, contes, nouvelles), albums, romans et poésie. » Pour soutenir ce beau projet, le mieux est évidemment d’adhérer à l’association (plus d’info : Au Nord les étoiles, 13 bis, avenue de la Motte-Picquet, 75007 Paris, ou www.aunordlesetoiles.com et contact@aunordlesetoiles.com).

 

* Ivar Arosenius, Voyage à chat(Kattresan, 1909), trad. Marie-Hélène Archambeaud, Au Nord les étoiles, 2016

Mon premier atlas des animaux

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Si comme moi vous êtes toujours un peu ébahi devant les pop-up, ces livres dont un personnage ou un monument, un paysage ou n’importe quel objet se dresse lorsque vous en ouvrez les pages, celui-ci ne vous décevra pas : Mon premier atlas des animaux, de la prolifique Ingela P. Arrhenius. Bien que simplement conçu, avec juste un animal au centre de chaque double-page, il présente intelligemment la faune des cinq continents. L’Europe, pour commencer, avec le blaireau, le phoque, l’élan, le renard, l’ours brun et d’autres ; puis l’Amérique du Nord et du Sud, avec le gopher, le cardinal rouge, le lama ou le toucan ; l’Afrique, avec le rhinocéros, le zèbre, le colobe ou le gnou ; l’Asie, avec le gibbon à mains blanches, l’ours de Gobi, le paon ou le cobra royal ; enfin l’Australie, avec le dingo, le kangourou, le bandocoot, le phalanger volant... Sans oublier l’Antarctique, avec le manchot papou, le grand albatros, l’orque, le chionis blanc... Des espèces que l’on ne présente plus et d’autres, méconnues, dont la préservation s’impose en ces temps désespérés pour la survie des animaux. Un livre à mettre entre les mains de tous les enfants.

* Ingela P. Arrhenius, Mon premier atlas des animaux (Animal atlas, 2023), Hélium (pop-up), 2023

Où est l’ours polaire ?

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Ingela P. Arrhenius est très productive. Les éditions Gründ publient deux nouveaux volumes d’elle, Où est le chat ? et Où est l’ours polaire ? Les amateurs (« dès 6 mois ») des régions boréales se réjouiront de retrouver dans ce dernier titre morse, lièvre arctique, renne et ours polaire dissimulés derrière un sapin ou un igloo en feutrine. Et comme d’habitude, un petit miroir, tout à la fin, permet à l’enfant d’observer son propre visage.

* Ingela P. Arrhenius, Où est l’ours polaire ? (Where’s Mr Polar Bear ?, 2021), Gründ, 2022

 

Coucou ours, Coucou pomme

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Coucou ours et coucou pomme : deux petits volumes sur papier cartonné, signés Camilla Reid, pour le texte et le concept, et Ingela P. Arrhenius, pour les illustrations. Un système de languettes à tirer permet, à chaque page, de modifier la scène sous les yeux du lecteur. La pomme est rouge, par exemple, et soudain un oiseau est perché dessus, alors qu’un ver à l’intérieur est en train de se rassasier. Avec, bien sûr, le miroir dans le soleil ou dans la fleur en fin d’ouvrage, pour que le très jeune lecteur (à partir d’un an) puisse voir son propre visage et s’imaginer dans le décor bucolique. Dans Coucou ours, tous les animaux sont convoqués : les écureuils, l’abeille, les hiboux, les coccinelles, etc. Deux beaux volumes ludiques et pédagogiques.

* Ingela P. Arrhenius/Camilla Reid, Coucou ours & Coucou pomme, Gründ, 2021

 

Compter, couleurs, contraires, formes et moi !

C’est un bien beau livre qui donne presque envie de retomber en enfance, que cet album « grand pop imagier » de Ingela P. Arrhenius, Compter, couleurs, contraires, formes et moi ! Chaque double page fourmille de choses à voir, de vignettes à soulever révélant des surprises, toutes joyeusement colorées. Le jeune enfant découvrira que l’apprentissage peut être un plaisir et un jeu.

* Ingela P. Arrhenius, Compter, couleurs contraires, formes et moi ! (Numbers, colours, opposites, shapes and me !, 2020), Hélium, 2020

Où est le tyrannosaure ? Où est la reine?

À destination des tout petits, les éditions Gründ continuent de publier des ouvrages signés Ingela P. Arrhenius, l’une des plus célèbres illustratrices suédoises contemporaines. Deux nouveaux titres en cette rentrée 2020, Où est le tyrannosaure ? et Où est la reine ? Comme dans les précédents, le texte est ici très court : une phrase interrogative, une illustration sur une double page, et un volet en feutrine à soulever pour avoir la réponse. Avec, à la fin, un petit miroir dans lequel l’enfant se reconnaîtra. Parfait pour habituer les jeunes enfants à tenir un livre entre leurs mains.

 

* Ingela Peterson Arrhenius, Où est le tyrannosaure ?, Gründ, 2020 ; Où est la reine ?, Grund, 2020

 

Mon amie de l’autre côté de la montagne

« Un petit poisson, un petit oiseau/s’aimaient d’amour tendre/Mais comment s’y prendre/Quand on est dans l’eau... » C’est un peu la question qui se pose aux deux grenouilles de cet album, Mon amie de l’autre coté de la montagne. Signé Lena Arro (née en 1956, auteure de nombreux ouvrages pour la jeunesse) pour le texte et Sara Gimbersson (née en 1958) pour les illustrations, Mon amie de l’autre côté de la montagne fait partie de ces ouvrages qui interrogent le jeune lecteur. Une grenouille est « assise au bord du lac Splitch », une autre « sur un nénuphar au lac Splotch ». Elles sont amies mais il leur est bien difficile de se rencontrer. Une idée : « faire le tour de la montagne ! » Bonne idée ? Pas si sûr, car quand l’une arrive chez l’autre, l’autre est partie chez l’une. Mais la lune, justement, est appelée à la rescousse et les deux amies finissent par pouvoir coasser ensemble. Un album plein de poésie, à lire et à relire.

 

* Lena Arro/Sara Gimbergsson, Mon amie de l’autre côté de la montagne (Min vän på adra sidan berget, 2016), trad. Marie Valera, Cambourakis, 2018

 

 

Dépêche-toi, Alphonse Aubert

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Les éditions L’Étagère du bas ont déjà publié deux volumes de Gunilla Bergström avec le personnage de Alfons Åberg/Alphonse Aubert : Bonne nuit, Alphonse Aubert et Bien joué, Alphonse Aubert. Celui qui paraît aujourd’hui, Dépêche-toi, Alphonse Aubert, déborde de nouveau de finesse et de tendresse. Pas mal, pour des albums destinés aux très jeunes lecteurs (à partir de trois ans) ! On retrouve ici le jeune héros âgé de quatre ans. Six heures du matin, « il doit bientôt partir pour la maternelle. » Son papa est dans la cuisine et l’appelle, pour qu’il vienne prendre son petit déjeuner. « Faut juste que je mette mon pull », répond Alphonse. L’heure tourne. Son papa attend, puis l’appelle de nouveau. « Faut juste que... » lance l’enfant, trouvant toujours une occupation plus urgente à faire, que de descendre dans la cuisine. Jusqu’au moment où il finit tout de même par être prêt. Mais alors, c’est son papa qui... Nous n’en dirons pas plus – cf. la dernière phrase de l’album, pile poil ! Simplement que cette série publiée dans les années 1970 est très précurseure, avec cette complicité père-fils mise en avant. Le papa semble être célibataire, nous n’en savons pas plus, et se montre tout à fait capable d’élever son enfant. Ajoutons le charme des illustrations (collages et aquarelle). Un grand succès en Suède, fort justifié.

* Gunilla Bergström, Dépêche-toi, Alphonse Aubert (Raska på, Alfons Åberg, 1975), trad. Marianne Ségol-Samoy, L’Étagère du bas, 2022

 

 

Bonne nuit, Alphonse Aubert

Tous les enfants de Suède connaissent les albums de Gunilla Bergström (journaliste, puis écrivaine et illustratrice, née en 1942), et notamment ses aventures de Alfons Åberg - Alphonse Aubert. Les éditions L’Étagère du bas ont l’excellente idée de les présenter enfin au public français (un seul titre de Gunilla Bergström avait été publié en... 1981, Les Fariboles de Bolla, une autre série). Alphonse est un petit garçon de quatre ans, « parfois il est turbulent, parfois il est sage », qui vit seul avec son papa. Une histoire de famille mono-parentale, à l’heure où les normes (un papa, une maman) ont du plomb dans l’aile. Dans ce premier volume, Bonne nuit, Alphonse Aubert, il ne veut pas s’endormir et utilise une ruse, puis une autre, pour rappeler son papa près de lui, avant que ce soit le papa lui-même qui pique du nez. Comme chez la plupart des auteurs suédois pour la jeunesse, et ce depuis l’illustre Astrid Lindgren, le revers de situation donne le beau rôle à l’enfant. Remarquons que le papa, « tout le temps gentil, presque trop gentil », se déplace avec une pipe à la bouche ! Ouf, pas de correction ici sur les illustrations ! Gunilla Bergström utilise diverses techniques dont le collage. Les éditions L’Étagère du bas offrent un bel album, aux cahiers cousus, ce qui devient de plus en plus rare. Après les volumes de Inga Borg mettant en scène le personnage de Plupp, bravo pour ce nouveau remarquable travail éditorial... !

 

* Gunilla Bergström, Bonne nuit, Alphonse Aubert (God natt, Alfons Åberg, 1972), trad. Marianne Ségol-Samoy, L’Étagère du bas, 2020

 

 

 

Bien joué, Alphonse Aubert

Dans ce deuxième volume, Bien joué, Alphonse Aubert, le jeune garçon a maintenant cinq ans. Ce qu’il préfère ? Deux choses. « La première c’est quand les grands jouent avec lui. (…) La deuxième c’est le placard parce que c’est là que se trouve la boîte à outils de papa. » Papa qui lit son journal et regarde la télé et n’a, pour l’heure, guère de temps à consacrer à son fils, auquel il conseille de jouer avec Puzzle, son chat, plutôt que d’utiliser la scie, si dangereuse. Alphonse obtempère, jusqu’au moment où il est coincé dans l’hélicoptère qu’il a construit avec des planches. Son papa pourrait-il se servir de la scie pour l’en délivrer ? « Je peux sortir », finit-il par dire. « J’étais coincé pour de faux. » Il a gagné, il est content : « Parce que papa a passé du temps avec lui. » Un bel album, sur le thème pas si évident de la complicité entre un père et son fils.

 

* Gunilla Bergström, Bien joué, Alphonse Aubert (Aja baja, Alfons Åberg, 1973), trad. Marianne Ségol-Samoy, L’Étagère du bas, 2020

 

 

 

L’Invention du Professeur Génialus

Auteure et illustratrice connue pour son abondance de détails, Elsa Beskow (1874-1953) n’était pas Ellen Key, elle n’était pas Astrid Lindgren non plus. Pleine de tomtes et d’enfants aux joues roses, son œuvre peut paraître un brin trop sage. Ou a pu le paraître, parce qu’avec le recul, ce n’est pas si évident. Sans doute n’est-ce pas un hasard qu’elle soit contemporaine du peintre John Bauer, dont les personnages étaient, finalement, assez similaires aux siens ; ou de Selma Lagerlöf. Elena Balzamo, à la tête de l’équipe de traductrices et de traducteurs qui s’est emparée des contes d’Elsa Beskow présentés dans ce volume, retrace rapidement dans sa préface le parcours de cette femme injustement mésestimée. Mère de six enfants, Elsa Beskow a néanmoins trouvé le temps de beaucoup écrire et de beaucoup illustrer. Elle a également publié des manuels de lecture, longtemps en usage en Suède. Bien sûr, aujourd’hui, son œuvre peut sembler désuète, mais sa façon de voir, sur le fond, demeure intéressante, voire pertinente. Elle est « cette visionnaire dont les histoires à première vue anodines ont une dimension non seulement actuelle, mais parfois même visionnaire », affirme à juste titre Elena Balzamo, ajoutant : « …Elle resta sa vie durant libre de tout engagement, n’épousa aucune idéologie. Constamment en retrait, ne prenant jamais part à une querelle quelconque, elle s’est toujours gardée d’utiliser son art comme arme polémique – tout en y laissant transparaître ses convictions. » Effectivement, la douzaine de contes relativement classiques de ce recueil laissent tous entrevoir, chacun à sa manière, combien nous pourrions vivre ensemble en paix si la tolérance, avec pour compagne l’intelligence, devenait vertu commune (cf. notamment « L’Invention du Professeur Génialus »). Toujours d’actualité, Elsa Beskow.

 

* Elsa Beskow, L’Invention du Professeur Génialus et autres contes, trad. sous la direction d’Elena Balzamo, Au nord les étoiles, 2016

 

 

 

Plupp construit sa maison

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Plusieurs fois primée pour son travail graphique, Inga Borg (née en 1925) est depuis longtemps très connue en Suède mais en France, on ne trouvait rien d’elle, si ce n’est deux petits albums parus il y a déjà quelques années, Parral le renne(Flammarion, 1975) et Une Vie de chien à Paris(Grasset, 1992), qui ne nous apprenaient pas grand-chose sur elle ni sur l’importance de son œuvre. L’Étagère du bas, maison d’édition nouvellement créée, entreprend la publication en français de différents titres de cette auteure-illustratrice qui a signé une cinquantaine d’albums. Plupp construit sa maisonse passe au nord de la Suède, comme tous les albums qui mettent en scène ce drôle de petit personnage aux longs cheveux bleus dont la personnalité manque peut-être d’une pincée d’espièglerie – ce qui le démarque d’autres héros pour la jeunesse de la littérature suédoise (pensons, bien sûr, à Pippi Långstrump/Fifi Brindacier ou à Emil de Astrid Lindgren ou à Findus/Picpus de Sven Nordqvist). Le décor est bien sûr, ici, un élément important et les illustrations rendent très bien la beauté de cette région boréale, la Laponie, avec ses lacs, ses montagnes rondes et ses forêts de bouleaux nains. Plupp ne manque pas d’ingéniosité, chacun des problèmes qui se posent à lui est résolu en un rien de temps. Pas tout à fait un tomte, pas tout à fait un petit enfant non plus, il n’a guère besoin des adultes et de leurs règles si pesantes pour s’en sortir. Parmi d’autres, un album plus récent comme Kommer till stan(paru en Suède en 1977), qui se déroule en partie dans un milieu urbain, le prouve. Plupp et les animaux (rennes, hermines, castors, blaireaux, chouettes des neiges, etc.) s’entraident et le succès les récompense. En dépit de la couleur de ses cheveux et de l’écharpe orange qu’il porte (quand il ne l’utilise pas comme voile pour son radeau), mais grâce à sa petite taille, Plupp se fond à merveille dans ce décor, au point que le lecteur ne le distingue pas toujours au premier coup d’œil. Il fait partie de la nature, au même titre que les animaux, les arbres, les rochers ou les cours d’eau parmi lesquels il vit, et en tire des leçons de solidarité : « personne ne dévore personne quand je suis là ». Il s’agit d’une œuvre non seulement humaniste mais aussi profondément écologiste (comme l’était, à son époque et en cela précurseur, Le Merveilleux voyage de Nils Holgersson, de Selma Lagerlöf). Souhaitons à cet album, dont la narration va plutôt à l’encontre des livres pour la jeunesse publiés en France aujourd’hui, de rencontrer le succès qu’il mérite et bravo à cette maison d’édition originale, L’Étagère du bas, de permettre aux jeunes et aux moins jeunes lecteurs cette rencontre.

 

* Inga Borg, Plupp construit sa maison(Plupp bygger bo, 1956), trad. Fredrik Monteil, L’Étagère du bas, 2016

Plupp fait un grand voyage

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Les éditions L’Étagère du bas continuent la publication en français des albums de Inga Borg et nous ne pouvons que nous en réjouir. Plupp, son personnage récurrent, est en effet un héros détonnant et sympathique, que les enfants apprécieront. « Loin, là-haut dans le Grand Nord, quelque part dans les hautes montagnes, vit un petit personnage du nom de Plupp. C’est là qu’il a construit sa maison, une petite hutte posée au bord d’un lac. » Dans ce volume, Plupp fait un grand voyage, des loutres dérobent le radeau de Plupp. Quand il le récupère, les rondins se détachent un par un, au beau milieu d’une rivière. Puis ses chaussettes servent à réchauffer les œufs d’une maman grue… Au fil du récit, le lecteur découvre la migration des grues et la reproduction des hermines Que d’aventures, en Laponie !

 

* Inga Borg, Plupp fait un grand voyage(Plupp gör en långfärd, 1957), trad. Fredrik Monteil, L’Étagère du bas, 2017

Un Hiver chez Plupp

Après Plupp construit sa maison et Plupp fait un grand voyage, les éditions L’Étagère du bas offrent aux jeunes lecteurs Un Hiver chez Plupp. Comme dans les précédents volumes, les illustrations à l’aquarelle sont oniriques et donnent envie de rejoindre le héros sans âge dans son sommeil. « Plupp est un petit être ‘invisible’ qui parle aux animaux. Il est invisible pour tous les humains – sauf pour toi et moi. » Auteure d’une œuvre conséquente (fiction et documentaire), Inga Borg (née en 1925) a présenté pour la première fois ce personnage singulier en 1955. Rappelons que Plupp a les cheveux longs et bleus, ce qui détonne dans le paysage bucolique dans lequel il évolue, et qu’il porte une écharpe orange. Une sorte de baba-punk écolo avant la lettre, qui s’efforce de vivre en harmonie avec ses voisins : la chouette des neiges, l’hermine ou les gloutons. Avec ou sans aurore boréale, les décors dans les petites villes suédoises, les forêts de bouleaux ou la Laponie sont magnifiques. Chaque page mérite que le regard s’y attarde. Pas seulement pour les enfants, donc, la série Plupp, mais aussi pour les adultes amoureux de la nature.

 

* Inga Borg, Un Hiver chez Plupp (Vinter hos Plupp, 1996), trad. Nills Ahl, L’Étagère du bas, 2020