M-N-O-P

Dans la forêt

Ce n’est pas à proprement parler un film suédois mais le Français Gilles Marchand a choisi presque d’un bout à l’autre un décor suédois pour son film, Dans la forêt. Deux enfants, d’environ neuf et douze ans, rejoignent leur père en Suède, où il vit maintenant, pour les vacances d’été. L’ambiance est très tendue. Ils auraient préféré rester à Paris avec leur mère, alors que lui entend les initier à la vie dans la nature. Les images sont belles ; parsemée de lacs et de montagnes, la forêt suédoise est envoûtante. La tension entre les personnages monte progressivement. Le plus jeune enfant croit voir le diable. Son père l’encourage à user de la télépathie pour communiquer avec son aîné. Ce dernier veut rentrer chez sa mère et tient tête à son père, de plus en plus décontenancé. Un film qui n’est pas sans intérêt, notamment pour son décor (et puis pour ce statut bien délicat de père durant la moitié des vacances scolaires…), mais qui aurait pu se passer ailleurs, dans une nature plus ou moins grandiose. On ne voit pas trop non plus ce que le réalisateur entend ici signifier : une mise en perspective de la difficile vie des pères qui n’ont qu’un droit de garde limité avec leurs enfants ? un hymne à la nature boréale ? une histoire ancrée dans le paranormal ? Tout cela, ensemble, ne s’imbrique qu’assez laborieusement.

* Gilles Marchand, Dans la forêt, Pyramide vidéo, 2017

Les Swedenhielm

À l’occasion du 100e anniversaire de la naissance de Ingrid Bergman (1915-1982), plusieurs des films dans laquelle l’actrice suédoise est à l’honneur ont été publiés en DVD (vost). Ainsi, Les Swedenhielm, de Gustaf Molander (1888-1973), dont le milieu n’est pas sans évoquer le roman de Hjalmar Bergman, Les Markurell de Wadkönping, cette bourgeoisie suédoise qui s’efforce de vivre au-dessus de ses moyens. Quand la famille Swedenhielm mise sur le futur Prix Nobel de chimie du papa pour éponger ses dettes... Drôle, incisif. Bonne satire des mœurs d’un milieu, d’une époque.

 

* Gustaf Molander, Les Swedenhielm (1935), SND/M6 video

 

 

Dollar

À l’occasion du 100e anniversaire de la naissance de Ingrid Bergman (1915-1982), plusieurs des films dans laquelle l’actrice suédoise est à l’honneur ont été publiés en DVD (vost). De Gustaf Molander, Dollar, d’après une œuvre de l’écrivain Hjalmar Bergman. Trois couples mariés, les hommes « frères et amis d’enfance », décident de partir au ski ensemble. Mais une jeune Américaine va compliquer leur vie en leur parlant de liaisons extraconjugales, ce que tous jurent ne jamais pratiquer. Cela, dans un milieu très aisé.

 

* Gustaf Molander, Dollar (1938)

Scènes de la vie familiale

« Comment Bergman met en scène la famille ? De quelle manière est traitée la relation parent-enfant » s’interroge Raphaël Yung Mariano dans l’essai qu’il consacre au cinéaste suédois Ingmar Bergman (1918-2007) : Scènes de la vie familiale. Son approche des films de Bergman, tous « fondé(s) sur la parole », se veut plus psychanalytique qu’esthétique, choix discutable mais l’auteur possède des arguments. Des Fraises sauvages à Fanny et Alexandre, du Septième sceau à Sarabande, il y a effectivement de quoi réfléchir sur le sens que le plus célèbre des réalisateurs suédois a voulu donner à son œuvre. Les liens familiaux, qui en forment l’ossature, ne sont jamais simples. En comprendre la logique peut permettre de mieux saisir leur complexité. « Les scènes de conflit chez Bergman prennent souvent la forme d’un ping-pong verbal où, peu à peu, il y a une libération des non-dits », observe Raphaël Yung Mariano, focalisant son étude sur trois longs métrages : Sonate d’automne (1978), Fanny et Alexandre (1982) et Sarabande (2003). « Bergman a filmé toute sa vie les échecs et les difficultés des rapports humains », souligne-t-il encore. De ce point de vue, le cinéma de Bergman s’inscrit dès sa création, non par sa forme mais par ses thèmes, dans un classicisme garant de son succès.

* Raphaël Yung Mariano, Scènes de la vie familiale/Ingmar Bergman (préf. Murielle Gagnebin), L’Harmattan (Eidos/Retina), 2017

Un Visage de femme

À l’occasion du 100e anniversaire de la naissance de Ingrid Bergman (1915-1982), plusieurs des films dans laquelle l’actrice suédoise est à l’honneur ont été publiés en DVD (vost). De Gustaf Molander, Un Visage de femme relate la vengeance d’Anna contre le chirurgien qui lui a laissé une cicatrice sur le visage. Ce n’est pas un rôle de jeune femme à demi cachée derrière un homme qu’Ingrid Bergman joue là, mais celui d’une intrigante capable de rivaliser avec des filous. « Je n’ai peur de rien et vous le savez ! » Intéressant.

 

* Gustaf Molander, Un Visage de femme (1938), SND/M6vidéo (2015)

Pettson et Picpus

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Trois DVD des aventures de Petsson et Picpus (Findus, en suédois) viennent de sortir : Pettson & Picpus en hiver, Pettson & Picpus et le lutin de Noël, Pettson & Picpus racontent des histoires. Directement inspirés des albums de Sven Nordqvist et destinés aux jeunes enfants, ces dessins animés enchanteront les adultes, tant les décors sont fignolés et les intrigues fines. Petsson, on le sait, est un vieux bonhomme ronchon qui vit seul dans une petite maison peinte au rouge de Falun, quelque part dans la campagne suédoise. Seul – ou plutôt avec Picpus/Findus, son chat tigré qui n’a pas la langue dans sa poche. Un chat qui parle, en effet, et qui se montre intelligent. Au point de se méfier instinctivement des individus avec des fusils, comme Gustavsson, ce voisin encombrant heureux de chasser faisans et renards. Trois DVD à regarder avec des enfants – ou même en solitaire, pour se remonter le moral.

* Sven Nordqvist/Torbjörn Jansson, Pettson & Picpus en hiver (1999), Pettson & Picpus racontent des histoires (2000), Pettson & Picpus et le lutin de Noël (2005), Septieme Factory (2020)

 

Les Grandes personnes

Quand Albert, bibliothécaire un peu nerveux, arrive sur une petite île de Suède avec Jeanne, sa fille de dix-sept ans, c’est pour découvrir que la maison qu’il a louée est occupée. La propriétaire et l’une de ses amies logent là, elles se sont trompées de dates. Contre mauvaise fortune bon cœur, Albert et Jeanne cohabiteront avec elles. Franco-suédoise (née en 1979) et compagne de Jean-Pierre Darroussin (qui joue ici le rôle d’Albert) Anna Novion réalise avec Les Grandes personnes un film sensible dans lequel les quatre personnages principaux s’efforcent de nouer de bonnes relations. À voir.

 

* Anna Novion, Les Grandes personnes (2008)

Missing

Sans doute certains visiteurs de ce site apprécient-ils les paysages suédois enneigés... ? Tournée dans la région de Borås, la série Missing les ravira. Quand une jeune fille est retrouvée morte, parce que tombée du haut d’une falaise, et qu’une autre a disparu, les soupçons de la police locale se portent vers l’importante congrégation religieuse installée dans la commune. Mais tout le monde se connaît, se protège, et les enquêteurs pataugent. Une courte série (4 épisodes de trois quart d’heure chacun) dénuée de scènes de violence, c’est à signaler, et bien réalisée.

 

* Colin Nutley, Missing (2017), Rimini éditions

Koko-di koko-da

 

Film étrange, que ce Koko-di koko-da du réalisateur suédois Johannes Nyholm (né en 1974). Horreur ? Fantastique ? Film qui met mal à l’aise et n’est pas sans évoquer Orange mécanique de Stanley Kubrick, voire les productions de Ruben Östlund (The Square, par exemple). Un couple perd son enfant, une fillette, et, trois ans plus tard, entreprend un voyage pour essayer d’oublier. Mal leur prend car peu après avoir planté leur tente en pleine campagne suédoise, ils sont attaqués par un insolite trio : un homme portant un canotier, une jeune femme au regard dément et armée d’un pistolet et un homme aux allures de troll, baraqué et portant un chien mort entre ses bras. Et la violence se déchaîne sous une forme ou sous une autre, puisque plusieurs versions de l’attaque sont proposées – ou ne s’agit-il que de cauchemars ? (Surprise : le film, sur la jaquette DVD, est censé être tous publics » !)

 

* Johannes Nyholm, Koko-di koko-da (2019), Blaq out

Eat sleep die

On peut penser à Rosetta (1999), le film des frères Dardenne, en voyant Eat sleep die de la réalisatrice Gabriela Pichler (née en 1980). D’origine croate, Raša vit dans le sud de la Suède avec son père. Celui-ci, malade, ne peut guère travailler et c’est la jeune fille qui assure leur quotidien. Employée dans une usine de conditionnement de légumes, donnant toute satisfaction à sa hiérarchie, elle est pourtant victime d’un licenciement économique. Trouvera-t-elle un nouvel emploi, alors qu’elle ne possède pas le permis de conduire ? Eat sleep die donne à voir un monde du travail, celui du bas de l’échelle, que le mépris récompense plus souvent que les primes, remarquablement absent des écrans de cinéma. Un film émouvant.

 

* Gabriela Pichler, Eat sleep die (Äta sova dö) (2012)