Géographie

La Norvège

Norvege

Les casquettes ne manquaient pas au Français Charles Rabot (1856-1944) pour parler de la Norvège, ce pays qu’il aimait tant : ethnologue, cartographe, journaliste, il fut considéré avant la Première Guerre mondiale comme le spécialiste des régions arctiques et effectua des missions officielles de cartographie. Les revues L’Illustration et Le Tour du monde, incontournables pour quiconque s’intéressait à la géographie à la fin du XIXe siècle, publièrent ses récits. Dans cette dernière, en 1887 et en 1897, ceux aujourd’hui réédités par les éditions Magellan & Cie, sous l’égide du magazine Géo. Aujourd’hui encore, plusieurs lieux portent son nom (dont un glacier dans le massif suédois du Kebnekaise). Le regard de cet homme passionné, érudit, conserve son intérêt. « Possédant toutes les langues du Nord, il a également traduit de nombreux ouvrages de savant et d’explorateurs anglais et scandinaves », relève Marc Wiltz, directeur de collection, dans sa préface. Et de citer les volumes de Roald Admundsen ou de Fridtjof Nansen. « Il n’est point en Europe de pays qui soit à la fois plus fréquenté par les touristes et plus mal connu des géographes que la Laponie », écrit Charles Rabot pour commencer son article « Exploration en Laponie ». Terre qui fascine, la Laponie accueillit diverses expéditions de curieux de toutes sortes animés par des intérêts divergents. « Sept étés durant », écrit pour sa part Rabot, « de 1880 à 1886, j’ai visité la Laponie norvégienne et la Laponie suédoise, la Laponie finlandaise et la Laponie russe... » Soucieux de découvrir les richesses géologiques des lieux, il n’ignore pas ses habitants, conservant les préjugés de son époque mais beaucoup moins vifs, cependant, que d’autres, ouvrant la voie à des interprétations ethnographiques modernes. « Les Lapons », observe-t-il, « sont restés doux, hospitaliers et honnêtes. Jamais en Laponie on n’entend parler ni d’assassinat ni de vol, si ce n’est de vol de rennes. Mais, dans l’esprit du Lapon, voler un renne n’est pas voler. » Des Finnois revendiquent la région du Finmark norvégien, où ils sont les plus nombreux ; à Vadsø, l’odeur de morue est partout... Les remarques du voyageur rebondissent, dans cette Norvège encore attachée à la Suède, son étonnement ne faiblit pas. « Vous voyez là des représentants de toutes les races du Nord, des pêcheurs norvégiens, des matelots allemands, des Finnois, des Lapons norvégiens habillés de robes de fourrures rapiécées, des Samoyèdes d’Arkhangelsk enfouis dans de longues pelisses en peau de rennes, des Caréliens, des matelots russes auxquels leur longue lévite donne l’air de sacristain. » Excellente idée de rééditer ces deux articles du Tour du monde, leur lecture nous transporte en ces terres, hélas, de plus en plus convoitées.

* Charles Rabot, La Norvège, Magellan & Cie/Géo (Heureux qui comme...), 2022