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À noter - 2015

+ Dans Le Canard enchaîné du 18 novembre 2015, un article de Sorj Chalandon, « Un pétrole peu raffiné », sur la série « Occupied » diffusée sur Arte et écrite par Jo Nesbø. « L’idée de départ est savoureuse, intrigante et pleine de promesses. Dans un futur proche, un ouragan endeuille la Norvège. (…) Le salut de l’humanité passe par une transition énergétique radicale et brutale. (Le gouvernement) annonce l’arrêt de sa production d’hydrocarbures offshore… » Mais les Russes envahissent le pays, avec l’assentiment de l’Europe, afin de remettre en activité les plateformes. En Norvège, la résistance s’organise. Hélas, l’intrigue déraille, regrette Sorj Chalandon, « le destin du pays est réduit à un catalogue de névroses individuelles ». Peut-être, ici, ce que nous reprochons souvent à Jo Nesbø dans ses romans : tout se tient jusqu’au moment où le rocambolesque supplante une action rigoureuse, où, également, la violence prime sur le reste et… L’intérêt se perd. Dommage.

+ Pierre Drachline… Pas de rapport avec la littérature des Pays du Nord ? Quoi que… Le premier roman publié en France du Suédois Jan Guillou fut La Fabrique de violence, traduit par Philippe Bouquet, dans la collection « Horizons nouveaux » des éditions Manya. C’était en 1990 et le livre remporta le prix France culture du roman étranger. Les éditions Manya avaient été fondées et étaient dirigées par Paul Duflos, mort en 1995, et Pierre Drachline, mort le 3 décembre 2015. Compagnon de l’écrivaine Ingrid Naour et ami du dessinateur Cabu (mort lui aussi au début de l’année, dans l’attentat contre Charlie hebdo), Pierre, qui devint ensuite directeur littéraire des éditions du Cherche midi, était un anarchiste obnubilé par la bêtise dont ses contemporains pouvaient faire preuve. Il a signé quelques romans remarquables, toujours empreints de sensibilité, de pertinence et d’érudition. Grande est notre tristesse.

+ Dans Le Monde du 26 novembre 2015, Olivier Truc souligne que les conditions d’accueil des réfugiés se durcissent même en Suède : « C’est émue aux larmes que la vice-première ministre suédoise, Åsa Romson (Les Verts), a annoncé mardi 24 novembre un durcissement historique de la politique d’accueil des demandeurs d’asile dans le pays. (…) La plupart des demandeurs d’asile ne pourront plus obtenir un permis de séjour permanent, mais seulement de trois ans, éventuellement renouvelables. Stockholm va limiter le regroupement familial. »

+ Adjö, Henning Mankell ! 

Il avait annoncé sa maladie et promis de tenir ses lecteurs au courant de sa progression ou de son recul (cf. son dernier livre publié, Sable mouvant, fragments d’une vie). Mais le cancer a été très rapide. Né le 3 février 1948 à Stockholm, Henning Mankell est décédé le 5 octobre 2015 à Göteborg. Le père de la série policière centrée sur le personnage de Kurt Wallander, par ailleurs dramaturge et auteur pour la jeunesse, qui a signé d’excellents romans qui n’appartiennent pas au genre policier (L’œil du léopard, Profondeurs, Les Chaussures italiennes), était sans doute l’écrivain suédois contemporain le plus fécond et le plus célèbre. Engagé, humaniste, amoureux du continent africain, il était aussi une conscience : quelqu’un avec qui il est possible de ne pas être d’accord mais qui oblige à la réflexion. Le Prix Nobel de littérature aurait pu le récompenser – Henning Mankell en avait la stature. (Certes, il était considéré avant tout comme un auteur de romans policiers mais pourquoi persister à mépriser un genre qui n’appartient plus depuis longtemps à ce que l’on appelle la « littérature de gare » ? Le nom d’Ursula Le Guin, auteur américaine de science-fiction, autre genre déconsidéré, figure bien dans les nobélisables.) L’un des tout premiers romans de Mankell, Daisy Sisters, est aussi, à ce jour, le dernier publié en France. Un beau voyage dans la Suède des années 1940 à 1990, mais surtout des années 1950, dont l’écrivain était resté à jamais nostalgique (plusieurs de ses ouvrages pour la jeunesse mettent en scène un enfant qui lui ressemble, dans la région de Sveg, à cette époque). Un grand bonhomme est parti…

Notons, parmi d’autres hommages, que le quotidien Libération lui a consacré sa couverture (« Étoile polar ») et quatre pages intérieures dans son édition du 6/10/2015.

Suède, toujours pays d’accueil

Dans L’Obs (n°2654 du 17 septembre 2015), un article consacré aux réfugiés : « Malmö, porte de l’eldorado suédois ». « La Suède », écrit Anne-Françoise Hivert, « a accepté plus de 35 600 demandes, plaçant le royaume en deuxième position des pays d’accueil en Europe, derrière l’Allemagne et devant la France. Proportionnellement à sa population, la Suède arrive largement première. » Si l’esprit de solidarité et de tolérance prédomine toujours, l’extrême droite grimpe cependant dans les sondages, un quart de la population affirmant aujourd’hui approuver les idées du parti Sverigedemokraterna.

+ Quand les éditeurs et les « commerciaux » s’amusent aux dépens des auteurs et de leurs lecteurs… !  

Publier une suite de romans dans le désordre est une pratique plutôt courante chez les éditeurs. Henning Mankell (Wallander), Liza Marklund, Anna Jansson et quelques autres y ont eu droit. D’un auteur de romans policiers, on publiera d’abord ce titre, le troisième de la série, puis celui-ci, le premier, puis le quatrième, puis… Parce qu’ils ont mieux marché ou parce que des responsables éditoriaux, ou plutôt commerciaux (les fameux redoutables « commerciaux », qui semblent parfois décider des lignes éditoriales !) estiment qu’ils conviendront mieux au public français – public qui n’est là que pour ouvrir le porte-monnaie. Les lecteurs attentifs, il en existe, qui apprécient tel ou tel auteur et tiennent à découvrir l’ensemble de son œuvre, s’ils ne prêtent pas attention à l’ordre réel de publication (et comment le feraient-ils puisque ce n’est indiqué nulle part, sauf lorsque la publication de la série est terminée), feront connaissance avec des personnages morts avant d’être malades, des enfants nés à l’âge de quinze ans, des couples séparés avant de se rencontrer ou d’autres invraisemblances de ce type.

+ Merci!

Remarquons que lorsque certains auteurs n’ont cesse, dans leurs ouvrages, de citer des noms de marques, le Norvégien Per Petterson cite, lui, des écrivains et des titres de romans – merci ! Merci de considérer les lecteurs comme des êtres doués d’un minimum de réflexion, d’intelligence, et pas uniquement comme des vaches à lait incapables d’aligner deux mots de plus de trois syllabes.

+ Sans surprise, Millénium 4 (Actes sud) en tête des ventes de cette rentrée littéraire 2015 avec un tirage initial de 500 000 exemplaires.

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+ Expo « Munch, Van Gogh » à Oslo, au Munch Museet, du 9 mai au 6 septembre 2015 ; puis au musée Van Gogh d’Amsterdam du 24 septembre 2015 au 17 janvier 2016.

+ Dans Charlie-hebdo n°1193 (3 juin 2015), un article du politologue Jean-Yves Camus sur l’extrême droite en Finlande. Ou comment le Parti des vrais Finlandais s’est emparé de deux postes importants, le Ministère des affaires étrangères et la Présidence du Parlement. « …L’entrée des Vrais Finlandais au gouvernement traduit un réel tournant conservateur dans les valeurs majoritaires au sein de la société finlandaise. Pour preuve, l’euroscepticisme grandissant, comme dans tous les pays du nord de l’Europe… » (Vive Charlie !)

+ Parmi les « 50 meilleures ventes en policier » recensées par le magazine Livres-Hebdo (n°1040, 1er mai 2015) entre avril 2014 et mars 2015, figurent plusieurs titres de Camilla Läckberg (4), de Arnaldur Indridason, de Lars Kepler, de Henning Mankell.

 

+ Jo Nesbø a signé une série télévisée en dix épisodes, coproduite par Arte et diffusée sur la chaîne franco-allemande prochainement, qui déplaît fortement à la Russie : Okkupert (Occupé). Le scénario ? La Norvège, dans un futur proche et à la suite d’une catastrophe écologique, décide de cesser l’exploitation de son pétrole. Une grave crise économique mondiale se profile et le voisin russe envahit le pays avec l’assentiment de l’Europe. Crédible ? Assez, en tout cas, pour que la Russie émette des protestations officielles. Il est vrai qu’on ne prête qu’aux riches… !

+ En marge de la littérature à proprement parler, relevons ces articles (LibérationLe Canard enchaîné, notamment) : les prisons suédoises ferment. « …L’immense majorité des condamnés, soit 13 000, purgent leur peine à l’extérieur, car, selon les juges, la détention nuit plus souvent qu’elle n’aide… » (Le Canard enchaîné, 25/02/2015) Agir sur les causes plutôt que sur les conséquences.

+ Livres hebdo (n°1033, 13 mars 2015) nous apprend que, au cours des cinq dernières années, les traductions, en français, de livres en langues scandinaves ont pratiquement doublé.

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+ Au Länsmuseet de la jolie ville de Gävle (deux cents kilomètres au nord de Stockholm), exposition Joe Hill du 14 mars au 7 septembre 2015. Expatrié aux Etats-Unis lors de la dernière grande vague d’immigration des Suédois vers ce qui semblait être une terre d’accueil, Joel Hägglund, dit Joe Hill (1879-1915), exerça de nombreux métiers, adhéra au puissant et actif syndicat IWW (The Industrial Workers of the World), dessina, écrivit des chansons revendicatrices et d’esprit internationaliste et devint une sorte de « protest singer » avant la lettre, auquel Bob Dylan ou Joan Baez rendront plus tard hommage, sans oublier Bo Widerberg avec son film éponyme (1971). Accusé d’avoir attaqué et tué un boucher et son fils pour les voler, ce qu’il ne cessa de nier, Joe Hill, « martyren från Gävle » (sous-titre de l’expo), sera exécuté le 20 novembre 1915. Son nom est attaché à l’histoire du mouvement ouvrier et aux heures noires de la démocratie américaine.

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+ Commencée au début de l’année, l’exposition « Le monde magique des Moomins » reprend du 20 juin au 4 octobre 2015 à la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image d’Angoulême. Exposition ludique à l’occasion des soixante-dix ans des Moomins, personnages créés par Tove Jansson (1914-2001), Finlandaise d’expression suédoise. Rappelons que les éditions du Petit lézard ont publié ces dernières années plusieurs des aventures des Moomins.